Harcèlement moral au travail
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Harcèlement moral au travail
Evolution jurisprudentielle des modes de preuves en matière de harcèlement moral au travail.
Le harcèlement fait l’objet d’une définition légale à l'Article L1152-1 du Code du Travail. L’Article L1152-1 du Code du Travail énonce en effet que: "aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel". Cette définition a été reprise par la Cour de Cassation à plusieurs reprises notamment au cours de deux arrêts rendus le 7 Juillet 2009 par la Chambre Sociale n°07-44590 et 8-40034.
Le principe est que les agissements constitutifs d’harcèlements doivent être répétitifs. (Cass. Soc. 4 avril 2006 n°04-43929) Or, il arrive qu’un acte isolé de harcèlement se double de discrimination prohibée. Depuis la loi du 27 mai 2008 n°2008-496, la France est en conformité avec le droit Européen. Désormais, et en vertu d’un arrêt rendu le 16 Décembre 2008 par la Chambre Sociale de la Cour de Cassation n°06-45262, il est possible de qualifier un acte isolé de harcèlement, à condition qu’il puisse être relié à une discrimination prohibée. (Cass. Soc. 7 juillet 2009 n°07-21957). Par cet arrêt la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a consacré une autre forme de harcèlement qui bien que isolée peut être sanctionnée en raison du comportement discriminatoire de l'employeur.
Le contrôle la de qualification du harcèlement moral au travail
Le 24 septembre 2008, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a rendu quatre arrêts très importants marquant un revirement de jurisprudence concernant le contrôle de qualification du harcèlement moral au travail. Par cette série de quatre arrêts, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a également revu sa position concernant la répartition de la charge de la preuve entre la victime de harcèlement et l'employeur.
Sur le caractère du harcèlement
Le fait que les agissements aient "pour effet ou pour objet" de nuire au salarié ou à ses conditions de travail laisse présager une éventualité quant à l’intention de nuire de l’employeur. Par un arrêt de la Cour de Cassation, en date du 21 juin 2006 n°05-43914, la Chambre Sociale a estimé que le harcèlement moral est "nécessairement intentionnel".
Pour autant, il n’est pas nécessaire que les agissements aient effectivement porté atteinte au salarié. Le fait qu’ils soient "susceptibles" de le faire suffit en dehors de tout préjudice avéré. Cependant, le plus souvent, le harcèlement moral se traduit par un impact sur l’état de santé du salarié. (Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation en date du 24 Octobre 2004 n°04-41008).
En vertu de l’Article L4121-1 du Code du Travail, l’employeur a une obligation d’évaluer et de prévenir le risque. Cette obligation de sécurité et de résultat vise la prise de mesures adaptées. L'obligation de sécurité s’étend à la santé mentale du salarié. Par un arrêt Snecma rendu le 5 mars 2008, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation n°06-45888, a estimé que l’employeur devait s’abstenir de mettre en place une organisation "de nature à compromettre la santé et la sécurité des travailleurs concernés". Il s’agit là d’une obligation de résultat (Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 21 Juin 2006 n°05-43914, qui pèse sur l'employeur à double titre, d'une part dans le cadre de son obligation de sécurité et d'autre part en raison de la prohibition de agissements constitutifs de harcèlement (Article L1152-1 du Code du Travail et suivants). Par conséquent, la responsabilité de l’employeur est facilement engagée dès lors que l’employeur a faillit à son obligation. Par ailleurs, il faut souligner le fait que le harcèlement peut être le fait de l'employeur lui même ou de l'un de ses salariés sur ses collègues. Dans le second cas de figure, l'employeur engage conjointement sa responsabilité civile.
Sur la charge de la preuve
La preuve du harcèlement est appréciée par les juges en deux temps : d'une part à travers la présomption de harcèlement que doit établir le salarié; d'autres part, par l'absence d'éléments contraires apportés par l'employeur.
La simple présomption suffit
La jurisprudence semble constante sur le domaine de la charge de la preuve. En effet, par un arrêt du 30 avril 2009 n°07-45264, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a jugé "que le salarié n'est tenu que d'apporter des éléments qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral".
Par conséquent, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Un basculement de la charge de la preuve est ainsi opéré car contrairement à la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, il n'est plus nécessaire de "présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement" mais seulement "des éléments laissant présumer" le harcèlement.
La Chambre Sociale de la Cour de Cassation confirme cette position par un arrêt du 7 juillet 2009 n°07-44590 au cours duquel elle sanctionne la Cour d’appel de Paris pour avoir fait "peser la charge de la preuve sur le salarié".
Le salarié doit faire présumer des agissements harcèlement
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 17 juin 2009 n° de pourvoi : 08-41105.
Dans cet Arrêt la Cour de Cassation sanctionne la Cour d'appel de Colmar pour avoir statuer "sans rechercher si les éléments de fait produits par la salariée ne permettaient pas, quel qu'ait été son propre comportement, de présumer l'existence d'un harcèlement". Une telle position de la chambre sociale témoigne d'une présomption de harcèlement qui joue en faveur du salarié. La chambre sociale souligne en effet, que "quelque soit le comportement du salarié, les juges doivent rechercher si les éléments apportés peuvent faire présumer des faits de harcèlement".
Eléments pris en compte par les juges
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 30 avril 2009 n° de pourvoi : 07-43219.
Le salarié qui se prétend victime de harcèlement moral au travail n'a pas à prouver les faits.
La Chambre Sociale de la Cour de Cassation par de nombreux arrêts notamment celui du 30 avril 2009 a considéré : "que le salarié n'est tenu que d'apporter des éléments qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral". Le salarié licencié pour inaptitude professionnelle n'avait en l'espèce pas à démontrer une quelconque relation entre son état de santé et la dégradation de ses conditions de travail; car il n'est pas nécessaire que le harcèlement moral ait un impacte sur la santé du salarié pour être sanctionné.
Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. La décision souveraine d'appréciation revient au juge après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Ainsi, par un Arrêt du 24 septembre 2008, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation n°06-43504, a écartée la qualification de harcèlement morale pour la simple raison que chacune des mesures invoquées par la salariée et mise en place par l'employeur était justifiée par la situation économique de l'entreprise et la nécessité de sa réorganisation.
La surcharge de la masse de travail
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 24 juin 2009 n°de pourvoi : 08-41681.
En l'espèce, la salariée avait fait l'objet de discrimination syndicale et de harcèlement moral sur son lieu de travail. La Chambre Sociale par cette arrêt sanctionne la Cour d'appel de Reims pour ne pas avoir recherché si la stagnation de la rémunération de la salariée et l'attitude de l'employeur en matière de congé et d'horaires de travail n'étaient pas liées à ses activités syndicales. La surcharge de travail apparait comme étant un indice que les juges doivent prendre en compte pour apprécier la présomption de harcèlement moral.
Il n'y a pas de définition légale de la surcharge de travail, cependant elle peut être définit comme étant une masse de tâches professionnelles à accomplir par le salarié qui ne soit pas en adéquation avec ses capacités productives ou avec celles imposées aux salariés travaillant dans les mêmes conditions.
Les reproches incessants
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 8 juillet 2009 n°de pourvoi : 08-41638.
Par cet arrêt, la Chambre Sociale de la Cour de Cassation a sanctionné la Cour d'appel d'Orléans qui avait estimé : "que le harcèlement moral est insuffisamment caractérisé dès lors que les attestations produites par la salariée ne décrivent pas de faits précis dont elle aurait été victime mais qu'à défaut de harcèlement moral, le supérieur hiérarchique avait manqué de doigté envers Mme X... en lui faisant des reproches répétés devant ses collègues". La Chambre Sociale réaffirme par cet arrêt l'exigence de simple présomption à rapporter par le salarié. En outre, la Chambre Sociale a estimé que les manquements de l'employeur en l'absence de justifications de la part de ce dernier incitent à la qualification de harcèlement.
Les reproches concernant les arrêts de travail ou les arrêts maladie
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 7 juillet 2009 n°de pourvoi : 07-44590.
Le fait pour l'employeur de ne pas permettre à une salariée de reprendre ses fonctions lors d'un retour de congé maternité assorti du retrait de responsabilités et d'une mise à pied de huit jours a été jugée comme injustifiée, et de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral.
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 7 juillet 2009 n°de pourvoi : 08-40034.
Il en va de même pour l'employeur qui avait envoyé de nombreuses lettres de mise en demeure évoquant de manière explicite une rupture du contrat de travail et reprochant aux salariés ses absences. La Cour de Cassation a de la même manière considéré que ces faits caractérisaient l'existence d'un harcèlement moral.
L'agressivité de l'employeur envers son salarié
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 24 juin 2009 n°de pourvoi : 07-45208.
A l'occasion de cet arrêt, la Chambre Sociale a confirmé la Cour d'appel de Versailles qui avaient reçu une demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse motif prit que l'employeur avait manifesté à l'égard d'un salarié "un comportement empreint d'agressivité traduisant sa volonté de restreindre ses fonctions au sein de l'entreprise". De tels faits étant bien évidemment constitutifs de harcèlement moral.
La baisse des fonctions et baisse de salaire
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 24 septembre 2008 n°de pourvoi : 06-45579.
En l'espèce, la salariée invoquait le retrait arbitraire de son statut de cadre, la stagnation de sa rémunération, la suppression de primes et d'éléments de salaire, la détérioration progressive de ses conditions de travail. Cela a légitimé la condamnation de l'employeur à des dommages-intérêts au titre du harcèlement moral sur la salariée victime.
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 24 juin 2009 n°de pourvoi : 07-41925.
Le comportement d'un employeur qui de façon répétée limite les missions de sa salariée, ce qui entraine une baisse de sa rémunération, a caractérisé des agissements de harcèlement moral.
La privation de la possibilité de faire des heures supplémentaires
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 3 juin 2009 n°de pourvoi : 07-43923.
Les juges prennent en compte la privation de la possibilité d'effectuer des heures complémentaires pour rechercher si de tels éléments sont de nature à faire présumer un harcèlement moral.
La suppression de poste
Arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation statuant le 5 mai 2009 n°de pourvoi : 07-45397.
Le "replacement du salarié à son ancien poste de travail" et la suppression de l'ensemble des responsabilités qui étaient antérieurement les siennes constituent des éléments de preuve à prendre en considération pour justifier la qualification de harcèlement moral.
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