Nicolet: les ambulanciers n'oublieront jamais
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Nicolet: les ambulanciers n'oublieront jamais
"Dans ma tête, ces enfants-là sont devenus des petits anges, et ils s'amusent tous ensemble à la cabane à sucre. Ça fait dix ans qu'ils sont là-haut, à s'amuser comme des fous, à se bourrer la face dans le sucre et à avoir le visage tout gommé de tire d'érable".
L'image que lance l'ambulancier Daniel Deshaies suffit à déclencher à la fois les rires et les larmes. C'est pourtant avec cette image que Mr Deshaies tente, depuis dix ans, de vivre pour faire la paix avec cet événement qu'il considère comme étant le plus grand deuil de sa vie.
Le matin du 16 mars 2000, ce sont ses collègues Louis Massicotte et Daniel Normand, de la Coopérative des ambulanciers de la Mauricie, qui sont arrivés en premier sur les lieux. Daniel Deshaies et sa coéquipière Isabelle Loranger ont suivi en renfort quelques minutes plus tard.
"Il était 9h17 quand on a reçu l'appel. Je vais m'en souvenir toute ma vie", lance Daniel Normand, qui était au restaurant avec son coéquipier. Les deux hommes se sont dirigés vers les lieux de l'accident, dont ils n'avaient encore aucune description, sinon la possibilité d'un mort et de plusieurs blessés.
A leur arrivée, c'est une autre réalité qui les attendait. Quatre enfants décédés sur le coup; quatre autres, dans un état très critique, se trouvaient un peu partout autour de la scène. "Au départ, j'ai cru que c'était une mère avec deux ou trois enfants qui se trouvaient dans le véhicule. Mais quand j'ai vu les autres enfants à l'extérieur du véhicule, couchés par terre, j'ai crié: C'est pas vrai ! C'est une garderie", se souvient Louis Massicotte.
Malgré l'ampleur de l'accident et le nombre impressionnant de blessés, le travail des ambulanciers a été extrêmement rapide. "Nous avions douze patients en tout, et en 23 minutes, ils avaient tous été transportés dans des hôpitaux", résume Daniel Normand. Les ambulanciers avaient pris la décision d'en amener certains du côté de l'hôpital Christ-Roi à Nicolet pour pouvoir revenir le plus rapidement possible sur les lieux, quitte à transférer les blessés vers l'hôpital Saint-Joseph de Trois-Rivières par la suite.
A 13h30, tous les transferts avaient été effectués et les patients blessés pris en charge dans les hôpitaux. "Entre 9h15 le matin et 13h30 l'après-midi, le temps s'est comme arrêté. On dirait que j'ai repris conscience du temps à 13h30. Là, j'étais à l'hôpital Saint-Joseph, et j'ai éclaté. J'ai pleuré", confie Daniel Deshaies.
"On n'est jamais prêt à faire face à ça. On a beau avoir toute notre expérience, rien ne peut nous préparer à faire face à la mort d'enfants", ajoute Daniel Normand, qui confie avoir conservé toutes les coupures de journaux et les enregistrements de bulletins de nouvelles de cette journée-là et des jours qui ont suivi.
Aide psychologique
Dans les 24 heures qui ont suivi les événements, les ambulanciers ont assisté à une rencontre de groupe avec un psychologue, et ont repassé le fil des événements ensemble. Mais pour Daniel Deshaies, Daniel Normand et Louis Massicotte, cette rencontre n'a pas suffi et les trois confrères ont dû consulter quelques mois plus tard.
"J'ai continué de vivre avec un motton en dedans de moi qui était toujours là et qui était comme un aimant à problèmes. J'ai eu besoin d'aide", mentionne Daniel Deshaies.
Les collègues admettent qu'il s'en est fallu de peu, après la tragédie, pour qu'ils abandonnent complètement la profession.
"Nous avons été mis en congé pour quelques jours après les événements, mais moi j'ai voulu faire un autre appel avant de partir en congé, histoire de mettre cet appel entre moi et la tragédie. Si ça n'avait été de ça, je ne sais pas si je serais revenu travailler", admet Daniel Deshaies.
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